L’auteur est professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal (UdeM) et au Bureau des affaires étudiantes, vie facultaire et équilibre de vie à cette faculté. Il s’exprime ici en son nom personnel. Dr. Cormier est médecin psychiatre, Clinique St-Léonard, Programme des troubles anxieux et de l’humeur, Institut de santé mentale Louis-H. Lafontaine de l’UdeM
Pour cheminer vers un certain bien commun:
En s’inspirant du leadership des Obama, Hollande et Layton et pour un bien commun à la Jean-Paul Jouary (voir plus bas), Monsieur Charest, MadameCourchesne et les membres du Conseil des ministres pourraient à nouveau optimiser leurs «offres» pourtant, de l’avis de plusieurs, déjà très généreuses. Les 70% et plus d’étudiants qui ont déjà de facto accepté les propositions gouvernementales montrent d’ailleurs très bien le bon équilibre de celles-ci.
Ceci dit, les quelques 15 à 20% (soit un peu plus de la moitié des 33% d’étudiants encore hors des classes) d’irréductibles sont là et font preuve, de l’avis de plusieurs également, d’une résilience remarquable… Que faire?
Faire preuve d’une modestie à la Camus (voir plus bas). Les leaders du gouvernement pourraient ainsi ultimement ajouter deux éléments à ses offres au sujet du fameux «objet crucial» des demandes des étudiants encore insatisfaits soit les droits ou frais de scolarité. Au nom notamment de ces nombreux étudiants qui souhaitent compléter leur session et qui sont actuellement otages du présent conflit.
Premier élément: annuler les hausses des droits de scolarité prévues de 2017 à 2019. Il sera toujours temps d’ajuster les frais de ces années selon une ré-évaluation de l’accessibilité après les hausses annuelles prévues de 2012 à 2017 soit 177 $ par année en tenant compte du crédit impôt. Il reviendra à la société civile mais ultimement à l’équipe gouvernementale démocratiquement en place à ce moment là de faire les ajustements équitables à compter de 2017-2018. Cette question – comme d’ailleurs celle de l’ensemble du financement des universités de 2013 à 2017 – pourra et sera certainement débattue pendant la prochaine ou même toute prochaine campagne électorale.
Second élément: le gouvernement pourrait considérer la possibilité de faire preuve de magnanimité, de bonne foi une nouvelle fois réitéré en proposant une entente comprenant un engagement ferme et sans condition de diminuer de moitié la hausse des droits prévue en 2012-2013, soit une hausse de 88.50 $ plutôt que de 177 $ (en tenant compte du crédit impôt). Cette réduction de la hausse prévue en 2012-2013 pourrait être compensée ou non pour le trésor public par des économies identifiées par, non pas le Comité provisoire prévu à l’entente du 5 mai dernier mais, un comité provisoire d’experts indépendants possiblement recrutés hors du Québec tel que proposé par Jean-Claude Leclerc dans Le Devoir du 14 mai. La bonification de l’aide financière (prêts et bourses) offerte par le gouvernement le 27 avril dernier devrait alors être ajustée en conséquence (à la baisse) pour 2012-2013.
Dans le cas où le comité d’experts indépendants confirmerait le sous-financement des universités québécoises et n’arriverait pas à identifier des économies d’efficience, il reviendrait alors au Conseil des ministres démocratiquement en place de prévoir spécifiquement le financement de cette diminution de la hausse prévue en 2012-2013. Tous les citoyens et particulièrement le corps étudiant devront être confrontés à la conséquence de ce manque à gagner pour le trésor public. Hausse ponctuelle d’impôt, hausse temporaire de taxe ou autre hausse tarifaire ponctuelle, diminution de subventions, économies identifiées au Conseil du trésor ou enfin hausse du déficit 2012-2013 et ainsi de la dette encore refilée aux contribuables contemporains et de demain. Assumer concrètement et clairement les conséquences de ce choix.
Aussi dans le cas où le comité d’experts trouvait des économies, celles-ci pourraient (devraient ?!!) être réallouées à d’autres besoins prioritaires des universités (voir Un sous-financement bien réél par Guy Breton et coll. Le Devoir, 12 et 13 mai 2012) incluant par exemple (parmi tant d’autres) des services bonifiés pour favoriser l’expérience étudiante au Québec notamment la santé, le bien-être et un certain équilibre de vie de l’ensemble de la communauté universitaire dans un monde souvent éprouvant. Idem pour les vies étudiante et communautaire des collèges.
Bien commun, démocratie comme exercice de modestie et carré couleur lilas:
Le bien commun évoqué plus haut est celui du philosophe français Jean-Paul Jouary: «Le bien commun le plus précieux, c’est le fait d’agir en commun pour dépasser ensemble ce qui fait obstacle au progrès de tous et à l’épanouissement de chacun». Oui être attentionné à tous mais pas au dépens de certains chacuns, certaines chacunes qui par exemple perdraient leur admission chèrement gagnée à un programme universitaire contingenté à l’automne 2012.
La modestie à la Camus – également évoquée plus haut – c’est celle citée par Antoine Robitaille dans Le Devoir des 21 et 22 avril 2012: «la démocratie, c’est l’exercice de la modestie. Le démocrate est modeste, il avoue une certaine part d’ignorance, il reconnaît le caractère en partie aventureux de son effort et que tout ne lui est pas donné et, à partir de cet aveu, il reconnaît qu’il a besoin de consulter les autres pour compléter ce qu’il sait».
Enfin le dernier mot à Jack Layton: «Mes amis, l’amour est cent fois meilleur que la haine. L’espoir est meilleur que la peur. L’optimisme est meilleur que le désespoir. Alors, aimons, gardons espoir et restons optimistes. Et nous changerons le monde».
À méditer par nous tous citoyens et par tous les leaders impliqués dans la crise actuelle de façon à ce que le «Ne perdons pas espoir» nous inspire un chemin gagnant-gagnant pour l’avenir face à cette crise. Une crise pouquoi pas ainsi transformée à terme en une opportunité modestement saisie pour un véritable bien commun toujours à tricotter et à retricotter serré…Et pourquoi pas en un carré couleur lilas à la Charest-Courchesne…